États-Unis, 2ème partie - De San Francisco à Chicago

Le California Zephyr, le trajet le plus fameux des États-Unis démarre depuis l'une des plus belle ville du pays San Francisco, pour en rejoindre l'une des plus tendances, Chicago ! Vamos ! Nous avions envie de découvrir le pays tranquillement après le grand road trip Canadien, et ce train emprunte la voie historique de la conquête de l'ouest, en traversant 6 états en 3 jours. Parfait.

Le départ du train se fait depuis la toute petite gare d'Emeryville, que le car rejoint en 30mn depuis le centre ville.
Un coup d'oeil à votre billet électronique, et l'hôtesse vous invite à grimper dans l'énorme machine plus haute que la gare !
Nous connaissons maintenant la disposition des wagons et filons directement dans la voiture panoramique lorsque les roues du train s'ébranlent pour 3 000km de trajet !

La Californie

Les images qui nous viennent lorsque l'on pense à cet état sont plutôt celles d'une grande côte de sable avec une zone aride en arrière plan. On constate bien ce paysage dans les premiers dizaines de kilomètres, toutefois la forêt reprend vite ses droits dès que l'influence côtière s'éloigne. Des forêts de conifères profondes qui tapissent des gorges et des montagnes, voilà le paysage de la Sierra nevada à cet endroit.

Le train monte doucement mais sûrement à travers la verdure, qui laisse apparaître des rivières encaissées ou des lacs par endroit.

Lorsque le sommet de la sierra est atteint, on distingue de la neige qui recouvre certain sommet aux alentours, dont les flancs aiment à s'entourer de nuages brumeux. Puis le train entame sa lente redescente de l'autre côté. Le climat change rapidement et c'est la végétation qui nous en donne les indices. De plus en plus petit, de plus en plus éparse, de plus en plus sec, le paysage passe du vert au jaune. Arrivé à Reno, nous sommes au coeur de l'immensité plate et aride qui fait la réputation du Nevada.

Le Nevada

Une végétation rase couleur paille, des arbres aux feuilles d'automne en or, des maisons recouvertes de poussière de sable, le paysage désertique se décline partout en teinte de jaune en ce mois d'octobre. A Winnemucca le soleil décline derrière l'horizon et nous nous endormons agréablement par un climat sec et des couleurs chaleureuses.

Le Colorado

La nuit s'est passée tranquillement dans le Nevada, et nous nous réveillons à la frontiere entre Utah et Colorado.

Arbres secs et tordus, sols caillouteux sans fin, collines rouges et arides qui barrent l'horizon. Ambiance western, c'est jour de spectacle dans le California Zephyr.

A l'approche des rares villes qui se sont installées proches des cours d'eau, le sol se tapisse d'un épais duvet d'herbe couleur curry. La terre se dote de manteaux les plus improbables ! L'ensoleillement et l'eau donnent avec succès à certain l'idée de cultiver. On y croise ainsi avec surprise des champs verdoyants et de superbes vergers au détour de falaises rocailleuses.

A Grand Junction, les falaises qui barrent l'horizon nous donne le ton de ce qui va suivre. Nous entrons dans le royaume de la rivière Colorado, celui des canyons et des gorges peuplées de torrents et de rapides ! Le train s'enfonce au coeur des montagnes rocheuses par un sinueux parcours. Taillé à coup de pioches par des coolies Chinois, des Afro Américains et tout ce que le far west comptait de bras en quête de dollars, le rail se fraye un chemin dans des passages toujours plus étroits !

Si la route nous suivait depuis le début du trajet, nous sommes désormais tous seuls dans des corridors labyrinthiques. La rivière plate auparavant s'emballe avec le rétrécissement du passage. Même la lumière ne s'infiltre plus dans l'entonnoir que forme la cathédrale de pierre creusée par le torrent. En haut, les flèches de roches se dressent et nous toisent de dizaines de mètres, en bas, le noir de l'eau s'écoule furieusement. Quelques remous font blanchir la surface de l'eau 10m à pic sous les rails. Pourvu que l'érosion soit suffisamment lente pour nous laisser passer!

Chaque tunnel nous fait franchir une scène pour découvrir une autre partie du Canyon. Rouge, gris, verdâtre, les gorges creusées par l'eau pendant des milliers d'années laissent apparaître les superpositions de roches différentes de cette immense chaîne de montagnes qui traverse le continent. Au coeur du massif, le train franchi deux plateaux d'altitude surprenants. Perchés dans la montagne, proches des stations de ski, ils abritent des villages encadrés de montagnes rougeoyantes sous un ciel bleu azur. Les locaux élèvent de belles vaches brunes bien dodues, pêchent de grosses truites, et font de tout ça des barbecues que nous voyons fumer dans les jardins. Une bière en plus et voilà le rêve Américain à l'état pur.

Un dernier tunnel de 10mn nous fait franchir le dernier col des rocheuses avant que le train n'entame une immense glissade de 2h. La nuit tombe pendant notre descente. Au loin en bas, une immense constellation se dessine dans le noir, c'est la capitale du Colorado.

Denver, point important après avoir franchi les derniers contreforts des Rocheuses, c'est l'heure de changer les locomotives. Nous faisons relâche 40mn dans la nuit naissante, et en profitons pour visiter la gare. Stupeur! Idée géniale, la grande gare carré et haute de plafond a été "re visitée" en un immense salon lounge avec des fauteuils et des canapés en cuir éclairés par des lampadaires de style. Les clients des bars, des restaurants, s'asseyent confortablement sans attendre de trains. Ambiance feutrée et jazzy dans ce hall de gare qui n'en a que le nom. Nous ne serions pas contre de rester une petite heure ici ! Le train repart est nous nous endormons en quittant silencieusement Denver.

L'Oklahoma

Que dire des immenses plaines infinies de l'Oklahoma si ce n'est que nous ne les auront pas vu ! Cet état est traversé de nuit et nous n'en verrons pas un champs.

L'Ohio

Le matin du 3e et dernier jour de trajet, nous ouvrons les yeux sur une grande campagne embrumée. Quand le brouillard matinale d'octobre se dissipe, il laisse la place à un grand paysage de pâture entrecoupé de champs et de sous bois humide où coulent de petits cours d'eau. On se croirait dans la campagne Française, quelque part entre Soissons et Amiens. Une fois franchi les rocheuses, le paysage change vraiment radicalement. Le relief, le climat, l'architecture, les cultures, les USA sont vraiment divisés en deux par cette chaîne de montagnes. Peu de village, des fermes isolées, un pays plat, un ciel si bas. Ce serait presque la Belgique en fait!

L'Illinois

On sait que nous arrivons dans l'état de la ville de Chicago quand on aborde une succession de village tous fait de brique, qui annoncent la traversée du Mississipi. Le fleuve, large comme 2 fois le Rhône à cet endroit, est une énorme frontière naturelle infranchissable. La région est toujours agricole mais les villages et les villes se font plus fréquents comparé à l'Ohio.

Le train file dans l'infiniment plat, où seuls les châteaux d'eau et les éoliennes donnent du relief à l'horizon. Les pick up se font plus présents, puis les tracteurs disparaissent doucement au profit des vans familiaux, nous voilà dans la banlieue de la ville du vent, Chicago.

Chicago, plein nord des États-Unis, adossé à d'immenses lacs, face à d'immenses prairies plates, balayé par des rafales de vent à faire voler les moutons, héritière de la misère ouvrière suite à la fermeture des grandes usines à la chaîne. Comment soupçonner que cette ville recèle une richesse culturelle aussi variée avec une situation comme celle ci ?

Chicago c'est d'abord une gueule. Celle d'une ville qui a su faire de la belle architecture un style de vie. Après un grand incendie qui rase la plupart des bâtiments, la ville décide de se reconstruire avec panache et développe son style. Pari réussi, le centre ville, même avec ses grattes ciel imposants,  réussi à impressionner le visiteur. Contemporain des styles belle époque et sécession, le style Prairie est moderne avec ses lignes épurées mais pas dénué de chaleur, grâce à ses motifs floraux, ses allégories, l'utilisation combiné de la pierre et du métal. Une balade dans le downtown le nez en l'air et la visite de certains halls d'immeubles donnent un aperçu de cette belle réalisation.

Ensuite, Chicago est une ville de bons vivants. Avec une population d'ouvriers, des usines de viandes et d'automobiles pendant des dizaines d'années, la ville n'est pas majoritairement peuplée de vegetariens adeptes des pilates et du paddle-yoga. Ici on aime les pizzas deepdish ou chicago-style (Découvrez la recette en cliquant sur ce lien), probablement les plus grasses, et les plus originales, du monde.

On passe son vendredi et son samedi à regarder le baseball et le dimanche on profite des terrasses pour déguster toutes les bières à la carte. La nuit s'anime de nombreux bars et clubs qui accueillent des groupes en tout genre, avec un accent jazz et blues fort marqué.

Les jeunes ont la pêche, la rue résonne de musique live, les couples mangent comme des ogres, bref, on prend plaisir à se balader et profiter de la vie dans les rues de Chicago.

Chicago c'est enfin un tempérament. Celui d'une ville haute en couleur, du plus sombre au plus flamboyant. La ville a connu son âge d'or du rêve Américain. Base de départ de la conquête de l'ouest, de l'exploitation du midwest, paradis pour les bandits, Al Capone en tête, coeur de l'industrie bouchère, et de l'automobile des années 60, elle a subi le chômage de masse et la misère ouvrière après la disparition de tout cela.  Aujourd'hui la ville s'est réinventée comme capitale de l'architecture, à la pointe du design.

Cela en fait une métropole complexe, pleine d'histoire et d'espace où les jeunes générations trouvent des lieux pour y exprimer leur créativité et contribuent ainsi à réinventer l'une des villes les plus intéressantes de l'est.